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Emmanuel Macron : Manager de la République
Le 28/03/2023
"Discret depuis le début de l'examen puis de l'adoption de la réforme des retraites par le Parlement, Emmanuel Macron s'est exprimé mercredi (22 mars) à 13 heures à la télévision. En pleine crise politique alors que l'opinion manifeste son mécontentement dans la France entière, le gouvernement d'Élisabeth Borne a évité la censure de neuf voix lundi 20 mars, à l'Assemblée nationale, après avoir fait usage de l'article 49-3 de la Constitution." - Le Point, Théo Sauvignet.
C'est dans ce contexte que j'ai souhaité analyser la communication non verbale d'Emmanuel Macron, sous le prisme de la posture. Il est un Président de la République dont le comportement tranche véritablement avec les précédents.
Emmanuel Macron est-il Président avec toute la symbolique que cela suppose ou agit-il plutôt comme un Manager ?
“C’est la première fois que vous vous exprimez depuis le recours au 49.3”
Le Président de la République est dans l’analyse, sa main gauche qui exprime normalement la spontanéité est retenue par sa main droite qui met à distance parce que l'instant nécessite beaucoup de ressources cognitives.
Comme on pouvait s’y attendre, les journalistes entrent dans le vif du sujet dès le début… Ainsi, sa langue sort très rapidement vers le bas pour y rentrer ensuite, il n’en pense pas moins mais il ne le dira pas, puis sa bouche se ferme en huître retenant ses non-dits. Emmanuel Macron est concentré, ses fentes palpébrales sont hautes, kl connaît son texte, il l'incarne.
Sur cette première minute trente cinq, il est intéressant de remarquer le sens donné aux mains du Président lorsqu’il évoque l’ordre chronologique. Elles passent de la gauche vers la droite, comme on écrit naturellement de la gauche vers la droite. Logique, encore faut-il l’avoir en tête. Ce n'est pas un geste réalisé pour imposer ou qui symboliserait une autre valeur que celle du temps.
A 2 minutes et 10 secondes, Julian Brugier souhaite faire réagir Emmanuel Macron sur les propos qu’il a tenu concernant la légitimité de la foule. Le visage du Président se fait alors dissymétrique, son hémi visage droit est ouvert, non contracté, son sourcil est tout à fait horizontal, l'œil bien ouvert, un simple rictus à la commissure des lèvres.
Son hémi visage gauche est lui contracté, le sourcil baissé à cause du front plissé (de contrariété, de colère ?), l'œil est plus petit avec la fente palpébrale très haute et ce même rictus qui va dans le sens de l’agacement.
“Merci de me permettre de clarifier cela” (2 min. 21)
Emmanuel Macron l’assène avec les paumes de ses mains jointes à l’horizontal, dans un mouvement de haut en bas. Il se met à la hauteur des autres avec une nécessité de trancher, de décider.
“Ce ne sont pas des propos qui sont à même d’apaiser” - “pardon, mais ce sont des propos qui clarifient”
Et effectivement, le Président confirme son statut et renforce sa position en frappant la table de la paume de sa main droite. Il est temps de siffler la fin de la récréation et de reposer le cadre.
Émotion de colère et de surprise lorsqu’Emmanuel Macron dit, menton et bouche bas, qu’il n’a pas plaisir à faire cette réforme et qu’il aurait pu faire comme ses prédécesseurs, c'est-à-dire de balayer la poussière sous le tapis.
“Dans les années 2030 il y aura 20 millions de retraités” assène Emmanuel Macron avec une langue de vipère comme confirmation de l’évidence. C’est une démonstration qu’il souhaite faire, c’est mettre le doigt sur un constat que tout le monde devrait avoir (4 min. 53).
Son bras gauche qui prend appui sur la table n’est pas là pour contribuer à la gestion de son stress, mais il est là pour “agrandir” le Président comme le font tous les animaux face à un danger. Et ce danger, la foule des manifestants, est incarné par Julian Brugier.
“Et il y a les blocages” (11 min. 06)
Les deux mains du Président viennent, paumes face à face, frapper la table dans un geste à nouveau tranchant, encore une fois pour faire montre de l’autorité à rétablir.
Ce faisant, sa montre cogne aussi la table produisant un bruit désagréable qui surprend son émetteur et le perturbe, le déconcentre dans sa démonstration. Alors pour ne pas que cela se renouvelle, il décide de la retirer en toute discrétion afin de rester dans sa dynamique d’échange (pas plus de polémique).
“On vous entend sur les intentions…” - “ce ne sont pas des intentions, ce sont des engagements” (20 min. 44)
Ses bras sont largement déployés pour occuper l’espace, pour prendre de l’envergure face à un journaliste qui vient de minimiser sa démonstration. Le Président se fait plus grand pour impressionner, il regarde son interlocuteur droit dans les yeux avec en plus une bouche en huître pour bien signifier qu’il vaut mieux qu’il se taise pour ne pas se faire plus autoritaire encore.
“Pourquoi ces réussites ?” (27 min. 57)
Emmanuel Macron toise gentiment Julian Brugier avec un sourire de satisfaction, voire cynique, son bras gauche se soulève subrepticement pour inconsciemment souligner, pour mettre en exergue et renforcer ce constat de réussite.
Lors de cette interview, c’est donc un Président de la République qui incarnait l’autorité que nous avons vu, une des facettes de son statut, comme le fait un manager avec son équipe lorsqu’il y a nécessité de décider.
Lien vers la vidéo : Retraites : l'interview exclusive d'Emmanuel Macron sur TF1 - REPLAY - YouTube
La mimésis vocale comme stratégie comportementale
Le 01/03/2023
Définir ce qu’est une stratégie comportementale
Les stratégies comportementales (…) regroupent l’ensemble des comportements observables utilisés par l’espèce pour s’adapter aux conditions d’un environnement afin d’assurer sa survie et sa reproduction. Cette définition réfère à celle des principes d’adaptation et d’évolution tels qu’observés, documentés et décrits par Darwin et se rattache également à la biologie comportementale.
Les stratégies comportementales humaines deviennent psychosociales lorsqu’elles sont plus spécifiques à leur induction par la société. L’espèce humaine est adaptée à son environnement social et y développe des comportements pour s’y adapter et y survivre en interaction avec les autres individus et en fonction des concepts et mécanismes en place dans cet environnement.
Lorsque nous sommes confrontés à des demandes intenses, tant sur le plan physique que psychologique, nous devons y répondre par des stratégies comportementales et cognitives qui nous impliquent, en nous confrontant à la situation ou en la fuyant. Ces stratégies répondent donc à un besoin et ont des objectifs différents selon la nécessité et les individus.
L’objectif peut être l’inclusion dans un groupe, la recherche de reconnaissance, le besoin d’opulence, la séduction… et les moyens mis en œuvre peuvent être cognitifs ou gestuels.
Plus globalement, dans toute interaction avec un ou des autres individus, il y a un dialogue vocal qui se crée dans notre tête qui va nous permettre d’intégrer les informations liées à l’environnement et à la personne, de les interpréter et de réaliser le passage à l’acte.
Ce dialogue vocal est appelé la mimésis vocale, elle fait partie intégrante du discours et concerne chacun d’entre nous. Nous entendons tous des voix dans notre tête et ce n’est pas pathologique pour autant que nous ne perdions pas pieds avec la réalité. « Dans le concert des voix orchestrées dans le langage (Perrin 2006) d’où émane le sens, les voix que tout énoncé rencontre inévitablement dans son processus de production ne sont pas que des métaphores des discours autres, ces voix ont également une consistance matérielle » (Barkat-Defradas, Dufour, 2007). C’est ce que Demers (2003) appelle la « voix sociale. » Elle a comme caractéristiques la voix physiologique en tant que tel, mais aussi la hauteur de voix, la modulation, l’intensité, le timbre et chacun de ces éléments apportent des informations quant au genre, à l’appartenance sociale, à la culture, l’origine géographique… la voix constitue notre identité sociale et identifie notre endogroupe.
Quel rapport avec une quelconque stratégie ?
Avec un dialogue vocal, être conscient de cette mimésis vocale intérieure nous permet de moduler notre voix, notre façon de parler, notre façon d’être tel que nous voulons être perçus, reconnus.
Une mère interagit avec son bébé, ses enfants, en adoptant une voix enfantine, maternelle. Un parent va recadrer son enfant en prenant une voix affirmée, sèche, lorsqu’on veut amadouer l’autre... Ainsi, nous adoptons certains éléments phoniques marqués à des fins de soumission, de dominance ou de marquage identitaire.
Quelques exemples de stratégies comportementales vocales ?
L’imitation est un bon exemple de mimésis vocale dans la mesure où l’imitateur intègre toutes les caractéristiques de la personne qu’il souhaite imiter. Il se crée alors un dialogue intérieur en amont de l’imitation proprement dite. Dans cette production parodique, il est facile de discerner les deux voix différentes.
L’échoïsation ou convergence vocale qui correspond à l’alignement progressif des éléments vocaux au cours d’une conversation (théorie d’accommodation communicative, Giles & Coupland 1991). « Dans une étude s’intéressant à ce phénomène au niveau segmental (consonnes et voyelles) et supra-segmental (prosodie et intonation), Pardo (2006) observe que la similarité phonétique augmente au fur et à mesure du déroulement des interactions. » Cet effet s’observe également dans un groupe ou, plus ou moins consciemment, une et/ou plusieurs personnes vont adapter leur façon de parler en fonction de celle du groupe dominant à des fins d’inclusion (Labov, 1966). « La parole du locuteur socialement inférieur va s’adapter à celle du locuteur socialement supérieur » (Gregory et al. 2001 : 39). J’ai, à titre personnel, très souvent constaté ce phénomène à l’école (collège, lycée), où certaines personnes désireuses d’appartenir à un clan plus affirmé, se sont mises à parler de la même façon, c’est-à-dire avec un accent de banlieue qu’ils n’avaient évidemment pas à l’origine.
« En 1992, Smith a mis en évidence que les femmes japonaises en position d’autorité troquent leur voix naturelle pour une voix sociale claquée sur le modèle masculin. »
Quelles en sont les limites ?
L’effet négatif est la limitation de la créativité, de l’innovation et de la diversité. Cette stratégie peut renforcer les écarts (rétroaction positive en cybernétique).
Sources :
IRASD / SSARI « Institut de recherche en architecture de société durable / Sustainable Society Architecture Research Institute (wordpress.com)
Smith, J. S. – 1992, « women in charge: politeness and directives in the speech of Japanese women”, Language and Society, vol. 21, 59-82.
M. Barkat-Defradas, F. Dufour – 2007, “la mimésis vocale : un phénomène dialogique ? », Cahiers de praxématique [En ligne], 49, document 2 – DOI : 10.4000/praxématique.934
Pourquoi le passage à l'acte délictueux ?
Le 21/02/2023
"L'avenir n'est pas ce qui va arriver, mais ce que nous allons faire." Henri Bergson, philosophe français (1859-1941).
Les statistiques de l’insécurité et de la délinquance en France pour 2022 (vs 2021) viennent d’être publiées, et elles ne sont pas bonnes (source : Insécurité et délinquance : les premiers chiffres 2022 | vie-publique.fr) :
- Coups et blessures volontaires sur personnes de 15 ans ou plus : +15%
- Vols sans violence contre des personnes : +14%
- Usage de stupéfiants : +13%
- Violences sexuelles : +11%
J’ai précédemment abordé l’importance de l’environnement et de l’éducation parentale. La préoccupation parentale n’est jamais mise sur le devant de la scène depuis Dolto et son “enfant est un sujet à part entière.” Malheureusement, les parents post 1968 ont gardé ce qui les arrangeait dans la théorie novatrice de Dolto. Ils ont omis la partie “l’enfant est un être en construction, mais qui ne peut pas se développer sans l’éducation des adultes - donc sans leur autorité” mais ont gardé la partie “enfant roi.”
Ce qui vaut pour les parents post 1968 vaut également pour les familles qui ont un fonctionnement de type clanique. “Le projet parental a une importance majeure pour la construction du destin d’un enfant. Il passe par une attention prêtée aux devoirs et aux résultats scolaires même si les parents n’ont pas pu faire d’étude (Rapport Dr M. Berger, 2021).” Ce défaut éducatif va avoir des conséquences importantes sur le développement psychologique de l’enfant. Absence d’empathie, construction d’un monde où il se voit omnipotent, pauvreté imaginaire, insensibilité, impulsivité, absence de sens critique.
Dans l’analyse comportementale, cet aspect environnemental est très important à analyser parce que c’est dans la petite enfance que se construit le faux-self (faux-soi). Selon D. Winnicott, le vrai self désigne l’image que le sujet se fait de lui-même et qui correspond effectivement à ce qu’il est et perçoit à travers une réaction adaptée.
Le faux-self désigne une instance psychologique et comportementale qui se sont constituées pour s’adapter à une situation plus ou moins contraignante. L’image de soi est alors défensive et fonction des réactions inadaptées de l’environnement.
Observer un groupe d’individus c’est prendre de la hauteur sur la situation, sur les interactions mais sans faire de focus sur une seule personne.
Axer son observation sur une personne serait une erreur car l’acte intentionnel n’est qu’une partie du comportement, ce n’est pas la cause. Il est donc nécessaire d’analyser l’environnement, le contexte pour apprendre à prévoir les comportements sur la base des informations que fournit le contexte et non pas seulement à partir de l’intention inférée des individus. C’est ce que fait d’ailleurs, de façon inconsciente, chaque membre d’un même groupe d’individus. Il analyse l’interaction au regard des règles sociales induites de ce même groupe de façon à prévoir à très court terme le prochain mouvement, la prochaine parole, le prochain geste, la prochaine réaction…
Une interaction ne se résume pas à un échange d’actions et de réactions entre deux ou plusieurs personnes, c’est aussi un moment d’échange de règles sociales et chacun vient avec les règles qu’il a apprises, avec toutes les différences que cela induit également (culturelles, statut socio-économique, familiales…). Ce moment d’échange revêt un aspect subliminal et seule l’information de faits nouveaux fait l’objet d’un processus autoréflexif.
Si nous identifions les conditions du passage à l’acte en général et criminel en particulier, il est alors possible de recenser les faisceaux d’éléments qui doivent nous alerter sur la probabilité d’un passage à l’acte délictueux.
Le passage à l’acte est la partie visible de l'iceberg de par sa soudaineté. C'est un long cheminement quotidien, souvent inconscient du criminel, et d’une conjonction de circonstances qui, mises bout à bout, aboutissent à un acte délictuel. « Le crime est la réponse d’une personnalité à une situation ». Égocentrisme, labilité, agressivité, indifférence affective, tels sont les quatre caractères fondamentaux de la personnalité qui sous-tendent le passage à l’acte (Pinatel).
Les criminologues font une distinction entre le « milieu du développement », qui influence la formation et l’évolution de la personnalité (la famille, les groupes sociaux, etc.) et le « milieu du fait », c’est-à-dire les situations dans lesquelles est placé le délinquant au moment de son crime. Ce "milieu du fait " est un facteur important dans le déclenchement du passage à l’acte.
Le processus qui conduit à l’accomplissement de l’acte comporte 4 phases (De Greef):
- la phase de l’assentiment inefficace,
- la phase de l’assentiment formulé,
- la phase de la crise,
- la phase du dénouement.
"L’étape initiale de l’assentiment inefficace est l’aboutissement d’un lent travail inconscient. Une occasion quelconque révèle au sujet « un état souterrain préexistant » : un rêve, la lecture d’un fait divers, une conversation, un film ou toute autre circonstance lui fait entrevoir par une sorte d’association d’idées ce que, sans le savoir encore clairement, il souhaitait vaguement depuis quelque temps, par exemple la disparition de son conjoint, dont il est las. Il accepte alors l’idée de cette disparition possible. Mais la mort de son conjoint est représentée dans son esprit comme un phénomène objectif dans lequel il ne prend personnellement aucune part. (...) Il imagine qu’elle puisse résulter de la nature des choses, d’un accident de la route, d’une maladie, d’un cataclysme, d’un suicide... Mais il envisage cette possibilité sans déplaisir : acquiescement encore inefficace, puisque le sujet ne se représente pas encore en tant qu’auteur de ce drame. Dans la plupart des cas, la velléité homicide très indirecte et très détournée s’arrête là, car l’équilibre est vite rétabli par une réaction morale. Mais quelquefois cela va plus loin.
L’assentiment devient ensuite un acquiescement formulé. Tout en continuant à s’efforcer de penser que la disparition pourra s’accomplir sans son concours, le sujet commence à se mettre lui-même en scène en tant qu’adjuvant de l’œuvre destructrice. Mais la progression de cette idée passe par des hauts et des bas. Le travail de dévalorisation de la victime alterne avec l’examen des inconvénients du crime. A ce stade, « un rien peut faire accomplir un bond prodigieux en avant ou susciter une fuite éperdue ». Le crime peut même survenir prématurément au cours de cette période, alors que la préparation du criminel n’est pas complète ou qu’il n’a pas eu le temps ou la hardiesse « de se regarder lui-même ». Une ivresse, une discussion, un événement hors série, une occasion exceptionnelle offerte par le hasard précipitent les choses. C’est ici que pourront se situer des actes mal exécutés ou dont l’éclosion apparemment soudaine trompera la justice sur leur véritable signification (De Greef). Mais, souvent, le dénouement est précédé d’une crise.
La crise est le signe que l’homme « marche à reculons » vers un acte aussi avilissant qu’un crime. Il ne s’y détermine qu’après une véritable agonie morale. Il faut qu’il se mette d’accord avec lui-même, qu’il légitime son acte. Plus il est « stabilisé dans des pratiques morales lui enjoignant la réprobation d’un tel acte, et plus il lui faudra de temps pour s’adapter à cette déchéance ». Quelques criminels cependant, pour surmonter cette pénible crise, s’imposent à eux-mêmes un processus avilissant « en se créant une personnalité pour que le crime ne soit plus une chose grave et tabou ».
Après le dénouement, on constate généralement un changement d’attitude. Le délinquant, qui se trouvait auparavant dans un état d’émotivité anormale, va manifester, selon les cas, un soulagement, des regrets, de la joie ou de l’indifférence. « Toute la personnalité du criminel se trouve condensée à ce moment-là. »
La réaction d’indifférence ou de désengagement se rencontre chez les criminels qui, ayant longuement vécu la préparation psychologique de leur acte, considèrent le résultat comme une conclusion logique de leur projet. Ils ont fait ce qu’ils voulaient accomplir et ils n’éprouvent pas le besoin de dramatiser davantage.
Pour aller plus loin : https://www.lesswrong.com/posts/CYN7swrefEss4e3Qe/childhoods-of-exceptional-people
Angelo Hesnard, Psychologie du Crime, La bibliothèque des introuvables, 2003.
Crédit photo : Depositphoto
Le 04/02/2023
Qu'est-ce qui est particulièrement fascinant dans le langage non-verbal ?
Quand on parle de langage du corps, on pense communication non-verbale. C'est par les interactions que nous jugeons, et le jugement a priori que nous portons a des conséquences sur les autres, mais également sur nous-même.
Donc, lorsque nous parlons de communication non-verbale, nous devrions avoir conscience que nos comportements infèrent sur notre image et donc le jugement que les autres vont avoir sur nous.
Ces jugements auront des conséquences sur nos comportements, sur notre chemin de vie, les choix que l'on peut faire. Il s'agit bien d'interactions entre une personne et une autre, entre une personne et un groupe, entre deux groupes...
Une dynamique comportementale assertive, affirmée, est l'expression d'une certaine confiance en soi. Et ça change tout ! Etre dans l'action, plutôt que de la subir, veut dire savoir faire des choix, prendre des décisions.
Est-ce possible de feindre cet état d'esprit ?
"Feindre" n'est pas le bon terme, "provoquer", "générer" serait plus approprié. Est-ce que notre communication non-verbale à une incidence sur la dynamique de notre façon de penser ? De notre état d'esprit ? Bien sûr !
Lorsqu'on adopte physiquement une posture assertive, qui mime la confiance en nous, nous nous sentons rapidement plus fort. C'est ce que fait le crapaud commun lorsqu'il se sent menacé par un prédateur. Il baisse la tête et gonfle son corps pour paraître plus grand qu'il n'est en réalité.
2 minutes suffisent pour générer une modification hormonale avec une augmentation du taux de testostérone et une baisse du taux de cortisole.
Notre dynamique corporelle a des conséquences sur nos actions et nos intentions.
Qui est l'auteur de violences conjugales ?
Le 14/01/2023
Immature, égocentré, paranoïaque, mégalomaniaque, instable, agressif, dysharmonie du caractère, jaloux, peur de l’abandon, conduites addictives, enfance dans un foyer insécure, tel est le profil de l’auteur de violences conjugales.
“Vendredi, aux alentours de 18 heures, la gérante d’un bar a été tuée de trois coups de feu, à deux pas des Champs-Elysées. Samedi, le site du « Parisien » a confirmé que son compagnon avait été arrêté par la brigade anticriminalité (BAC). Les officiers de la BAC étaient en effet en patrouille avenue de la Grande-Armée, à Paris, lorsqu’ils ont vu un homme sortir du bar-restaurant L’aiglon avec une arme à feu. La femme de 41 ans assassinée quelques secondes avant était en fait la compagne de l’homme. Selon le site du « Parisien », l’homme de 45 ans était sous l’effet de l’alcool lorsqu’il a été arrêté, et il répétait sans arrêt qu’il avait tué sa femme. « La gérante a été prise pour cible alors qu'elle se trouvait derrière le comptoir de son établissement. L'auteur présumé des faits n'a pas opposé de résistance au moment de son interpellation », a confirmé Christophe Crépin, porte-parole du syndicat de police Unsa.
La gérante de ce bar était une femme sympathique, toujours disponible et qui bossait dur », a témoigné auprès du « Parisien » une commerçante de l'avenue de la Grande-Armée. La victime était une mère de famille : elle avait quatre enfants, dont plusieurs en bas âge. La fleuriste a par ailleurs affirmé que la gérante du bar était « en instance de séparation et que son divorce s’annonçait difficile ». D’après le quotidien, le compagnon de la victime était connu des services de police pour « violences conjugales ». (source : Laura Boudoux, www.elle.fr)
Statistiques des féminicides en France en 2022 (source : www.feminicides.fr)
- par (ex)compagnons : 110 (+16 tiers dont 10 enfants)
* 94 tuées chez elles, 15 ailleurs, 1 non connue
* 58 en contexte de séparation et/ou de violences connues (peu renseigné)
* 69 étaient mères (dont 6 tuées avec leurs enfants) + 2 enceintes (5 mois et 8 mois)
- pas toujours renseigné
* 143 orphelins dont 38 témoins (34 présence, 4 découverte).
* 31 suicides du tueur + 12 tentatives + 2 en fuite
- par compagne : 0 (0 suicide, 0 tentative)
- par non conjugaux : 12 (dont 4 relations avec le tueur non renseignées, dont 0 personne trans, dont 1 féminicide prostitutionnel)
Selon une étude menée sur 558 articles, se rapportant à 337 crimes, ont été collectés et analysés, il ressort que 263 ont été commis par des hommes (78%) et 74 par des femmes. Ces crimes ont fait 458 victimes, dont 295 femmes, 149 hommes, 14 enfants. (source : “Psychosociologie du crime passionnel”, Houel, Mercader, Sobota, puf 2008)
Le rapport Coutanceau (source : VIOLENCES CONJUGALES (haut-conseil-egalite.gouv.fr) annonce qu’une femme tous les quatre jours et un homme tous les seize jours, en France, meurent victimes de leur conjoint et/ou à la suite de violences conjugales. Ce même rapport précise que la moitié de ces femmes subissent déjà des violences, qu’un décès sur dix résulte de coups portés sans intention de donner la mort, mais que là encore la violence préexistait dans deux cas sur trois.
A l’inverse, un homme meurt tous les seize jours et, dans la moitié des ces cas, la femme auteur de l’acte subissait des violences de sa part.
“Les modèles sociétaux, politiques, régissant les relations entre hommes et femmes sont intimement mêlés au sexual. Dans notre développement en tant qu’individu, nous sommes obligés de composer avec trois éléments à la fois :
- une différence des sexes réelle, à laquelle, dans les années les plus fondamentales de la construction de notre psyché, nous ne comprenons pas grand-chose, que nous interprétons en fonction de perceptions incomplètes et colorées par les mouvements affectifs qui nous traversent,
- l’interprétation politique de cette différence, inscrite dans les institutions, les discours et les pratiques de l’univers social où nous baignons et qui l’investit affectivement et sexuellement,
- et enfin la place que nos parents, dès leur enfance, nous ont préparée dans leur monde inconscient, sur la base de la façon dont eux-mêmes ont été exposés à la différence anatomique et à la distinction politique.
Le point nodal de ces processus est donc la famille : c’est là que nous intériorisons et actualisons les normes sociales qui régissent notre vie intime.”
Les psychiatres experts concluent assez systématiquement à la pathologie du narcissisme, sans démence au moment des faits. De façon générale, la comparaison entre le criminel passionnel et le tueur sexuel s’arrête sur la problématique de l’objet ; le ou la criminel(le) passionnel(le) a un objet, est en relation avec lui, avec celui qui est tué ; le pervers n’a pas cette reconnaissance de l’altérité, son acte étant tout entier négation de l’autre.
On retrouve très fréquemment une association d’emprise, d’autoritarisme rigide souvent, et de négligence, d’abandon, voire de maltraitances graves, qui peut effectivement conduire l’enfant ou l’adolescente à craindre pour sa vie physique et entraver gravement sa vie psychique. Ce sont des familles où l’on ne se parle pas.
Les capacités de symbolisation sont marquées par la socialisation sexuée du côté des hommes et mise à mal par la nécessité dans laquelle ils sont d’obéir aux canons de la virilité. Impossible accès à la culture, autoritarisme, vécu de danger qu’entraîne l’exposition aux violences paternelles subies notamment par la mère (mais aussi par l’enfant), la place donnée au travail qui vient comme colmater le déficit d’expression des affects, la relégation des femmes à la sphère domestique.
Avoir une femme, au sens le plus cru de l’appropriation, est le seul accès à une identité virile, et plus profondément à un sentiment d’existence : posséder “sa” femme est une question de vie ou de mort. Côté homme, c’est l’attachement extrême aux valeurs traditionnelles comme un mouvement défensif lié à l’angoisse de castration. La virilité mascarade peut se dévoyer en machisme, c’est à dire la terreur d’être assimilé à une femme, puisque le féminin ne peut être entendu que comme l’équivalent de “châtré”.
L’abandon associé à l’impensable de la séparation constitue le noyau central du processus à l'œuvre dans cette criminalité passionnelle. La perspective d’une rupture est synonyme d’anéantissement. Ce qui est menaçant, c’est l’objet prenant existence, du fait même du risque de le perdre.
Le 24/12/2022
Franz BRENTANO, philosophe et psychologue autrichien (fin XIXème, début XXème), est connu pour avoir développé le concept d’intentionnalité. Parmi ses élèves, nous retrouvons notamment Husserl, le père de la phénoménologie, rien de moins… Brentano avait mis au cœur de son programme philosophique une théorie des quatre phases de l’histoire de la philosophie.
“Cette théorie prend son point de départ dans l’observation de certaines régularités dans le cours de l’histoire de la philosophie et elle repose sur l’hypothèse que l’on peut identifier, au sein de chacune des trois grandes périodes de son histoire, c’est-à-dire l’Antiquité, le Moyen Age et la Modernité, quatre phases ou moments, la première étant ascendante, et les trois trois dernières marquant son déclin” (D. Fisette).
Ce qui est intéressant avec cette théorie est qu’elle peut également expliquer et mettre en lumière l’évolution d’une tendance. Qu’elle soit vestimentaire, capillaire, verbale ou comportementale, les quatre phases expliquent le chemin parcouru de l’ascension jusqu’à son remplacement par une autre tendance. Je dis “tendance”, mais ces phases fonctionnent avec à peu près tout, y compris les stratégies comportementales basées sur les émotions et sur les comportements qu’il est de bon ton d’adopter lorsque tel sujet est abordé (social, politique, religieux, économique, humanitaire…).
L’ascendance
Au départ, l’intérêt pour une coupe de cheveux, une façon de marcher, de parler et de s’habiller naît au sein d’un groupe identitaire.
Ce fut le cas pour la grosse moustache chez les homosexuels des 80’s, des blousons anglais “harrington” avec polo Fred Perry chez les skinheads, la démarche des rappeurs et le pan de pantalon remonté sur le mollet, la coupe de cheveux de Presnel Kimpembé… et je ne parle pas des tics de langage (“wesh”, “du coup”...) mais c’est encore plus prégnant avec la mode du tatouage.
Chacun de ces tics, chacune de ces tendances est née au sein d’une tribu, d’un groupe spécifique, identitaire puis ont été repris et démocratisés chez les tout-venants.
L’affaiblissement
L’intérêt pour le tic, la tendance, s’affaiblit au sein du groupe identitaire qui va se mettre à la recherche inconsciemment d’un autre signe distinctif. Lorsque le groupe voit que ses signes distinctifs sont un peu trop généralisés, la nécessité de se réaffirmer et de se reconnaître revient.
Évidemment, le précédent tic a été remarqué par le plus grand nombre, démocratisé, d’où une perte de rigueur et de précision quant à sa réelle définition, sa mise en pratique, sa spécificité. Il a perdu de sa substantifique moelle, comme un mot qui sonne creux, vide de sens.
Le tic est tombé dans le tout-venant par l’intermédiaire des réseaux sociaux, les influenceurs (le paroxysme du vide, je ris pardon, peu sont divertissants mais ceux-là s'inscrivent justement dans une démarche de création) et autres manifestations propres à chaque groupe.
La construction de dogmes
C’est à dire une proposition théorique établie comme une vérité indiscutable, autoritaire et normative, par l’autorité qui régit une certaine communauté ou groupe. Le tout-venant s’accapare ces tendances, ces tics et leurs inventent une nouvelle légitimité et paternité. Il spolie en quelque sorte le groupe initial. Chacun peut revendiquer d’être à l’origine du tic, de la tendance.
La dégénérescence
C'est-à-dire la perte des qualités intrinsèques et naturelles des caractéristiques initiales. L’intérêt tombe en désuétude pour le tout-venant qui cherche une autre façon d’exister, de se démarquer, de combler les vides de sa propre existence en reprenant à son compte d’autres expressions, d’autres coupes de cheveux qu’un authentique créatif aura lui, fait naître.
Voilà les quatre phases qui fonctionnent avec TOUTES les tendances dans la plus stricte tradition mercantile, c’est du business pour ceux qui surfent sur la vague ; c’est du social pour ceux qui s’y reconnaissent réellement. Le truc encore plus sophistiqué, mais les marques de cosmétique, de prêt à porter (entre autres) l’ont déjà bien compris, c’est de créer une pseudo-valeur identitaire autour de leur propre marque ou d’une tendance.
Si vous avez un ardent désir de vous reconnaître une identité, c’est légitime, essayez déjà de connaître vos valeurs propres. Il y a un effort d’introspection à faire.
Ensuite il est possible de rechercher quel groupe a en commun vos valeurs. Mon opinion est que trop souvent les individus cèdent à la facilité et ne cherchent pas à se connaître. Ils épousent donc un tic qui semble plaire au plus grand nombre et qu’en soi, ce doit être bon pour eux, pour leur ego… ce sont en réalité de faux-semblants ou biais de conformité.
Mais ce n'est que mon opinion ;-)
L'empathie exactement (version améliorée)
Le 26/11/2022
L’empathie est cette capacité à se mettre à la place de l’autre afin de comprendre ce qu’il éprouve. Elle se distingue de la sympathie, de la contagion émotionnelle et de la simulation d’autrui.
La contagion émotionnelle est un phénomène de propagation d’une émotion d’une personne à une autre.
La sympathie suppose que nous prenions part à l’émotion éprouvée par l’autre, que nous partagions sa souffrance ou plus généralement son expérience affective. Ce qui induit que dans l’empathie, on comprend l’émotion de l’autre parce qu’on la connaît mais on ne l’éprouve pas au même moment. Il n’y a pas d’établissement de lien affectif.
Je récapitule : j’éprouve de l’empathie pour vous si…
- Je constate une émotion chez vous que je connais grâce à mon expérience. J’en connais les manifestations physiques, physiologiques et psychologiques.
Le cas échéant, il me serait quand même possible de connaître votre état émotionnel, ce serait une analyse dite “froide”. Je sais ce que vous éprouvez, mais sans l’éprouver moi-même dans la mesure où je n’ai pas l’expérience de cette émotion (exemple : le vertige). Je n’ai alors qu’une compréhension purement conceptuelle de votre état. On parle alors de « théorie de l’esprit » ou d’« empathie cognitive », par opposition à l’empathie émotionnelle (Blair, 2008 ; Preston et de Waal, 2002).
- Je partage le même état émotionnel que vous d’autrui sur certains aspects pertinents. Par exemple, vous pouvez être jaloux et moi me sentir triste pour vous, mais je ne partage pas votre jalousie, sinon ce serait de la sympathie.
- Ce que je ressens est induit par ce que vous ressentez. Nous pourrions ressentir la même émotion devant un même événement, un même match, une même œuvre… mais je n’éprouve pas pour autant de l’empathie pour vous, puisque je peux totalement ignorer votre existence et continuer à ressentir la même émotion.
(Source : https://www.cairn.info/revue-le-journal-des-psychologues-2011-3-page-16.html)
Quelle est la composante évaluative de l’empathie ?
Une situation donnée provoque une réponse émotionnelle pour autant qu’elle représente un potentiel émotionnel pour la personne qui vit la situation. C'est-à-dire que la situation doit générer chez elle une recherche de satisfaction, ou la nécessité de s’y soustraire.
Nous avons d’un côté des raisons d’agir, et de l’autre le déclenchement d’émotion lorsque ces raisons d’agir sont frustrées ou satisfaites.
Ces dispositions sont bien sûr conscientes (manifestes) ou inconscientes (latentes).
Quelle est la pertinence de la situation ?
Si la situation ne nous apparaît pas pertinente par rapport aux motivations, alors elle ne déclenche pas d’émotion et le processus s’arrête.
Si au contraire elle est pertinente par rapport aux motivations, elle déclenche une émotion positive ou négative. Se pose alors la question de savoir ce que la personne peut faire ou ne pas faire pour répondre à cette situation.
Enfin, le degré d’urgence, la dangerosité et la difficulté de la situation sont des facteurs qui sont évalués sur la base d’informations récoltées précédemment. Cette dernière étape aura une incidence quant à l’intensité de l’émotion ressentie, sur la rapidité de la réaction émotionnelle et du passage à l’acte.
《Perception-action processes are accordingly the driving force in the evolution of empathy. With the more recent evolutionary expansion of prefrontal functioning, these basic processes have been augmented to support more cognitive forms of empathy. (...) A Perception-action model of empathy specifically states that attended perception of the subject’s representations of the state, situation, and object, and that activation of these representations automatically primes or generates the associated autonomic and somatic responses, unless inhibited.》
Avec ce model Perception-Action, il n’y a pas d’empathie sans projection liée à nos propres représentations pour comprendre l’état émotionnel de l’autre.
(source : E. Pacherie, “L’empathie et ses degrés”. A Berthoz & G. Jorland. 2004 ; Preston, Stéphanie D and De Waal, Frans B, 2001, 《Empathy : its ultimate and proximate bases》)
Le 13/11/2022
Après la mort de la reine Elisabeth II et le couronnement du roi Charles III, c’est l’avenir de la Firme qui se joue actuellement. Avec l’autobiographie de Harry, une série documentaire qui permettra de suivre Meghan et Harry dans les coulisses des Invictus Game prochainement diffusée sur Netflix : “Heart of Invictus”. Et également la saison 5 de la série “The Crown” qui vient de sortir, dont l’intrigue évoque le mariage désastreux entre Charles et Diana, et fait polémique en Angleterre.
Au-delà de ça, c’est le pouvoir inquantifiable de l’influence de la Firme qui représente un réel atout financier.
Sources : Le documentaire Netflix de Meghan et Harry sortira-t-il un jour ? | Point de Vue
Comment s’inscrit l’avenir du couple Meghan et Harry dans ce contexte, alors que Meghan est la cible récurrente des critiques ? Quel est le rapport entre les frères ?
Le couple Harry et Meghan
Meghan a fait des études universitaires “relations internationales” et du théâtre, elle a travaillé à l’Ambassade américaine en Argentine et a joué dans quelques séries. Elle a appris à “être” devant une caméra, elle est en permanence dans la séduction en ramenant très souvent ses cheveux en avant, côté gauche avec sa main gauche. Elle est dans la relation avec l’autre, son hémi visage droit est donc plus ouvert que le gauche qui semble plus contracté. Meghan a besoin du regard que le public porte sur elle pour nourrir son ego mais sans s’investir émotionnellement. Elle apparaît comme un produit marketé, superficielle.
Harry quant à lui à l’hémi visage gauche plus expressif, il est plus investi émotionnellement, il ne sait pas faire semblant. C’est le rebel qui veut faire différemment pour échapper aux impératifs liés à son rang. Il apparaît protecteur avec Meghan et n’hésite pas à se mettre en retrait pour lui laisser le devant de la scène. C’est un instinctif, un émotif qui sait que ça peut le desservir, donc il tend à ne pas montrer ses émotions. Sa bouche se ferme à chaque fin de phrase contrairement à Meghan. Il est pudique et perçoit l’environnement comme défavorable, comme risqué.
Le couple William et Kate
Kate est anglaise, elle s’inscrit plus naturellement dans l’avenir de la Firme. Elle fait naturellement partie du groupe “Angleterre” et part ainsi avec un avantage a priori. Elle semble afficher une image plus lisse qui colle davantage avec ses obligations, tout en retenue. Elle se montre très souriante, que ce soit des sourires authentiques ou sociaux, elle détient les codes. De ce fait, son hémi visage gauche est plus ouvert, son œil gauche est plus grand que le droit. Elle paraît ainsi plus authentique, plus dans la relation.
C’est William qui fait le lien entre la Firme et son frère. Il est avenant, patient, plein d’humour. Il se montre prévenant envers sa femme (main sur le dos à Windsor notamment) mais aussi envers Meghan si vous regarder la fin de la marche à Windsor, juste avant que chacun reparte en voiture.
“Windsor walkabout”
Liens :
William, Kate, Harry and Meghan Reunite for Windsor Walkabout - YouTube
Harry and Meghan Make Surprise Appearance with William and Kate at Windsor - YouTube
William, Kate, Harry & Meghan reunite to mourn the Queen - YouTube
Meghan et Harry marchent main dans la main, montrant un attachement, un lien affectif. C’est un geste, qu’il soit conscient ou non, qui montre qu’ils sont unis. C’est dans leur intérêt de susciter une image positive de leur couple et de leurs intentions. Sur une des premières poignées de main que Meghan a avec le public, il y a un temps long entre le moment où elle tend sa main à la personne et le moment où celle-ci la prend effectivement. C’est une question de timing qui illustre symboliquement que Meghan peine à trouver le bon tempo, les bons codes.
Meghan a sa tête inclinée sur sa gauche avec sa longue chevelure devant son épaule gauche, la gestuelle de la séduction activée mais il s’agit pour elle d’une ritournelle gestuelle. C’est systématique, systémique pourrait-on dire. Le couple semble emprunté, lui a une posture droite, il replace souvent son pan de veste avec sa main pour lui conférer de la prestance, c’est un geste mi-conscient.
Lorsque Meghan prend la jeune femme dans ses bras, son geste est contrit, il y a peu d’amplitude dans le geste alors que la jeune femme lui fait un vrai “hug”. Encore une fois, cela montre une certaine maladresse à “être”hors caméra.
Kate et William quant à eux marchent l’un à côté de l’autre mais pas main dans la main. C’est l’apanage des “vieux couples” pleins de connivences, sans tension, ils ont l’habitude d’être ensemble en toute décontraction et surtout, ils possèdent les codes. Kate se montre très souriante, que ce soit des sourires sociaux ou authentiques. Seule sa main droite est active, un geste nous indique qu’elle est dans le contrôle alors que William a ses deux mains en mouvement. Il se montre déférent en inclinant sa tête lorsqu’il salue une femme du public. Il a le même geste que son frère lorsqu’il replace son pan de veste de costume, c’est un geste de micro traction qui symbolise l’autorité, un geste qu’ils font fréquemment.
Contrairement à Meghan, les cheveux de Kate sont positionnés de façon naturelle. Le seul geste que Kate fait régulièrement est de se replacer une mèche de cheveux derrière son oreille gauche pour se recadrer, pour bien se centrer sur son sujet.
Avant de remonter en voiture, on voit bien l’aisance du couple Kate et William par rapport à Meghan et Harry qui semble plus empruntés. On voit que c’est William qui donne le “la” en montrant à Meghan où regarder et à quel moment remercier la foule.
Pourquoi pleurer et montrer que nous pleurons ?
Lien : Meghan Markle Cries at The Queen's Funeral: The Perfect Photo Op - YouTube
De quel côté du visage la main intervient-elle pour essuyer les larmes ? Côté droit, la personne ne se sent pas responsable de ce qui se passe. Elle est triste mais elle n’aurait pas pu éviter la situation. Côté gauche, la personne se sent pleinement responsable et pleinement impliquée dans la situation. Si la personne s’essuie la larme de la main du même côté, c’est un geste sincère. Croiser serait mettre en œuvre davantage une stratégie.
Une étude menée par Wagner et ses associés (1993) et une autre plus ancienne par Hall (1984) ont montré que les femmes sont plus précises dans leur jugement des indices émotionnels que les hommes - expressions faciales et comportements non verbaux. Elles sont donc meilleures que les hommes pour distinguer les faux pleurs des vrais. Les hommes sont quant à eux plus sensibles aux indices émotionnels négatifs des autres hommes, comme la colère.
Nous sommes plus enclins à porter secours à une personne en larmes, elle nous renvoie à notre impuissance. Une étude hollandaise de Von Royen et ses collègues (Van Roeyen I, Riem MME, Toncic M and Vingerhoets AJJM (2020) The Damaging Effects of Perceived Crocodile Tears for a Crier’s Image. Front. Psychol. 11:172. doi: 10.3389/fpsyg.2020.00172), nous indique que les personnes qui pleurent sont perçues comme étant plus fiables et honnêtes.
Reconnaître de fausses larmes versées par l’autre a de vraies conséquences sur la perception que nous avons de la personne a posteriori. Les personnes qui sont perçues comme faisant semblant de pleurer sont perçues comme étant moins fiables, moins chaleureuses, moins compétentes. Elles sont moins bien intégrées dans un cercle d’amis, de collègues… Que les pleurs soient faux ou authentiques, la personne sera disqualifiée du point de vue de son image.
De prime abord, on voit immédiatement l’intérêt de savoir faire semblant de pleurer pour une personne qui monétise son image sur les réseaux sociaux entre autres… il faut simplement bien le faire pour ne pas être pris à son propre jeu.
Pour en revenir à la “vraie fausse larme” de Meghan Markle, j’émets quelques doutes sur l’authenticité de l’émotion qui n’aurait aucune connection avec la situation immédiate. Meghan bénéficie de sa formation d'actrice pour se remémorer un souvenir triste et personnellement impactant pour verser une larme bien venue.
Ouverture
Meghan est victime d’un biais où les hommes et les femmes manifestent un traitement préférentiel pour les personnes de leur famille, ou d’un même groupe dans lequel les membres sont jugés plus favorablement (Hamilton, 1975 "innate social aptitude of man" ; Schaller, 1992 "endogroupe favoritism and statistical reasoning in social inference" ; Goodall 1986 "the chimpanzee of Gombe : patterns of behavior"). Mais également du fait qu’elle a une formation d’actrice qui lui confère la possibilité de travestir ses émotions.
Selon la Théorie de l'Identité Sociale (Tajfel & Turner, 1979), les individus sont attachés à certaines appartenances groupales et sont capables de comportements liés à cet attachement au groupe qui véhicule ses propres croyances. Lorsqu'un individu appartient à un groupe social désavantagé, en résulte pour lui une identité sociale négative (Tajfel & Turner, 1979). Pour inverser cette perception et la rendre plus positive, diverses stratégies peuvent être mises en œuvre (van Knippenberg, 1989) comme la mobilité individuelle, la créativité sociale et la compétition sociale (Tajfel & Turner, 1979). Dès 1974, Turner développe la notion de “compétition sociale”.
Selon la théorie de l’auto-catégorisation (Turner, 1987 ; Turner et al., 1987 ; qui s'est développée à la suite de la Théorie de l'Identité Sociale), “quand les individus se catégorisent en tant que membres d’un groupe, le soi est vu comme un exemplaire du groupe, plutôt que comme un être unique. Les différences interpersonnelles deviennent non pertinentes, et les affinités entre soi et les autres membres du groupe d’appartenance viennent à l’avant-plan. Quand un individu se définit comme une individualité, il est motivé à améliorer son identité personnelle. Mais quand il se définit en tant que membre d’un groupe, il perçoit ses buts, besoins et valeurs comme interchangeables avec les autres membres ; dès lors il est motivé à améliorer le sort commun.”
Meghan souhaite-t-elle appartenir à la Firme ou se définit-elle en tant qu’individualité ?