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Analyse de la gestuelle du Président Macron - voeux 2019
Le 01/01/2019
Les vœux du Président Emmanuel Macron étaient très attendus, s’inscrivant dans un contexte particulier pour lui et certainement pas à son avantage. Cependant, il ne faut pas oublier que c’est un exercice qu’il affectionne, pour autant qu’il délaisse certains mauvais conseils de communication.
Le corps parle bien avant que les mots ne le fassent. Alors quels ont été son attitude, son style ?
Déterminé et combattif
La détermination ne peut être feinte si elle est enrichie de gestes qui marquent son engagement. En dépit de toutes les critiques que ses opposants pourront faire au Président Macron sur le contenu de son discours, ses gestes d’affirmation de soi assurés, voire agressifs attestent de son investissement.
Regardez ses gestes fréquents et simultanés effectués avec ses 2 mains. Ils traduisent un désir d’unir mais ce qui est plus intéressant encore, ce sont les pouces qui se lèvent, qui l’affirment dans sa fonction mais également dans sa détermination à titre personnel.
Cet investissement est également perceptible lorsque ses mots s’accompagnent de mouvements de sa main gauche, alors que la droite reste en retrait. C’est bien lui, à titre personnel, en tant qu’individu, qui s’affirme.
A 1 minute 45 : « pour changer en profondeur les règles d’indemnisation du chômage, afin d’inciter davantage à reprendre le travail », ça lui tient à cœur.
A 2 minutes 49 : « notre pays veut bâtir un avenir meilleur reposant sur notre capacité à inventer de nouvelles manières de faire et d’être ensemble », ses doigts sont en pince (l’extrémité de l’index et du pouce se touchent) relevant ainsi son désir de précision, de justesse, d’importance. Ce geste reviendra souvent dans le dernier tiers de l’allocution.
La détermination s’illustre encore davantage lorsque le Président Macron pointe le sol avec ses 2 index pour souligner l’urgence à agir immédiatement : « alors même qu’il nous faut bâtir aujourd’hui de nouvelles réponses à ce phénomène. (…) Je suis intimement convaincu que nous avons à inventer une réponse, un projet, profondément français et européen (à 3 minutes 50). »
Enfin à 8 minutes 31, la détermination peut tourner à une marque d’agressivité lorsqu’il frappe sa paume droite de son poing gauche, geste qu’il exécutera plus d’une fois sur le dernier tiers de son discours : « on peut débattre de tout mais débattre du faux peut nous égarer, surtout lorsque c’est sous l’impulsion d’intérêts particuliers. »
Dynamique et authentique
Le Président Macron use d’une gestuelle économe, simple, pas trop stéréotypée mais plus dans un souci de ne pas trop en faire.
Comme vu plus haut, les mouvements de sa main gauche attestent de son implication personnelle. C’est bien le cas à l’évocation des « victoires sportives », de la « célébration de l’armistice. » C’est également le cas à son axe de tête qui tend légèrement sur sa gauche et qui n’a d’autre objectif que celui d’adoucir son discours. Il se veut empathique. Ses mains restent très majoritairement à l’horizontal, il se met au même niveau que son public. Ses doigts ne montrent pas de tension particulière, ses sourcils s’élèvent régulièrement pour marquer certains mots.
Le Président peut également se montrer agacé en tirant subrepticement sa langue, comme c’est le cas sur la « colère contre les changements profonds » (à 2 minute 49), ironique par certains petits sourires en coin qu’il affectionne, ou encore chafouin lorsqu’il tire rapidement une langue de délectation avant d’aborder son 3ème vœu, celui de la vérité.
Froideur et distance
Certaine personne ont cette faculté à mettre une distance entre eux et les autres. Ça tient à peu de choses, peu de gestes, cependant le ressenti est bien là. Certains vont la nommer snobisme, sentiment de supériorité, alors que pour d’autres ce sera de la pudeur. En tous les cas, il s’agit bien d’une adaptation comportementale pour se protéger du monde extérieur, perçu comme trop agressif.
Son illustration est très simple, c’est la main droite qui vient couvrir la main gauche pendant le discours, c’est mettre en avant son hémi visage droit pendant qu’on parle.
Voyez Laurence Ferrari qui présentait le journal avec le même hémi visage face caméra. Elle garde une image froide alors que Claire Chazal qui présente systématiquement son hémi visage gauche est bien plus dans le lien avec les téléspectateurs. Ca fait toute la différence et ça ne se contrôle pas, sauf à prendre des cours de théâtre pour se réconcilier avec son corps et apprendre à laisser sortir ses émotions.
Les gestes sont révélateurs de l’état émotionnel sur l’instant, du degré d’implication de la personne et si les mots qui viennent suppléer ces gestes sont concordants, alors la communication est réussie. De ce point de vue, c’est bien le cas.
Lien vers la vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=iIS9JatcYeU
Relation de causalité entre la frustration et l'agression
Le 30/12/2018
L’agression. Une des réponses possibles à la frustration qui prend toutes sortes de formes, de l’homicide à l’insulte. Active ou passive, physique ou verbale, directe ou indirecte, elle est un « comportement destiné à blesser intentionnellement un autre individu, ce dernier étant motivé à en éviter les effets supposés aversifs (Barn et Richardson, 1994). » Elle peut être déplacée d’un objet à un autre, dans le sens psychanalytique du terme, c’est-à-dire qu’elle vise une personne en particulier mais elle est produite sur une autre.
Sa fonction est double. Hostile, donc impulsive, ou instrumentale, donc réfléchie. Hostile dans la mesure où elle est destinée à faire du mal sous l’émotion de la colère. Instrumentale parce qu’elle est produite sur une personne mais dans l’unique but d’acquérir un objet, un bien ou un gain.
Dès la petite enfance, les enfants agresseurs sont rejetés par les autres enfants (Kupersmidt, Burchinal et Patterson, 1995). Ce rejet anticipe de futurs comportements hostiles qui nuiraient à la cohésion du groupe. Malheureusement, ce n’est pas sans conséquences pour les tumultueux parce qu’en les ostracisant, cela va renforcer leurs frustrations et nourrir leur colère (prophétie auto réalisatrice).
De surcroît, ce comportement agressif, s’il vient à perdurer, aura un impact sur l’implication éducative des parents. Ils se montreront moins attachés (Patterson, Capaldi et Bank, 1991). Ce qui aura également pour effet de renforcer le caractère agressif de leur progéniture (Rohner, 1975). La renonciation des parents dans l’éducation de leurs rejetons est aussi la conséquence de faits de vie et de facteurs socio-économiques (chômage, décès, dépendance à l’alcool, à la drogue…).
Ensuite, dans une optique d’inclusion et de reconnaissance, les enfants agressifs vont se rapprocher d’autres qui auront un profil semblable, chacun s’influençant. Ils finiront par constituer un groupe dont la dynamique ne sera pas développée ici, mais leur individualité se perdra au profit de l’identité du groupe.
L’explication de ce comportement agressif est à trouver dans l’intensité proportionnelle de la relation de cause à effet, entre la frustration et l’agression. Plus la frustration est grande, plus l’agression le sera. La frustration est nécessaire à la vie en société. Robert Merton (1957) a établi que le comportement d’agression est la conséquence d’expériences sociales frustrantes. Il y a eu un écart significatif entre l’envie, le désir et le but qui n’a pas été atteint. Cela tient aux barrières psychologiques (manque de ressource), aux barrières physiques (mauvaise auto régulation des émotions), au manque de reconnaissance, aux échecs subis, aux humiliations ou encore à la confrontation à des facteurs environnementaux (comme le bruit, vétusté de l’habitat, pauvreté…). Des chercheurs ont également montré que des personnes qui jouent à un jeu vidéo violent, avec un faux pistolet au lieu d’une simple manette, sont plus agressives par la suite (Barlett, 2008).
Quelles solutions alors ? J’en vois 3…
Tout d’abord le renforcement positif par des félicitations, des récompenses, de la motivation, de l’accompagnement.
Mais c’est également punir quand cela est nécessaire afin d’inhiber le comportement agressif. La punition doit être expliquée, mesurée, avec une date de fin. Elle ne doit pas mettre en jeu l’intégrité de l’enfant, elle ne doit pas être avilissante ni humiliante.
Il est aussi fondamental de développer les fonctions exécutives de l’enfant afin de développer sa capacité d’attention, de concentration, de curiosité et de créativité tout en veillant - autant que possible - d’éviter l’injustice.
Cette guidance va contribuer à mettre en place et développer l’autorégulation émotionnelle nécessaire à une bonne socialisation, une bonne estime de soi, une meilleure perception de soi et l’empathie. Avant Dolto, l’enfant n’était pas considéré, il devait s’adapter. Après Dolto, nous avons compris que l’enfant était une personne à part entière mais nous sommes tombés dans l’excès inverse en termes d’éducation. A trop laisser l’enfant faire, il est devenu un roi incapable de gérer ses frustrations. L’immédiateté, l’instantanéité peuvent être une bonne chose pour autant qu’elles ne soient pas systématiques. Tout est une question de curseur.
Mais gardons bien à l’esprit qu’en tant qu’agresseur, victime, parent ou tierce personne, c’est la personnalité qui domine la situation, le choix existe mais il peut être gourmand en énergie psychologique, cognitive et émotionnelle.
Réf. :
"L'agression humaine", L. Bègue, éd. Dunod
"L'éthologie humaine", JD de Lannoy, éd. PUF
"Pulsions et destins des pulsions", S. Freud, éd. PBP classiques
Crédit photo : inconnu
L’influence sociale dans le suicide de l’adolescent…
Le 01/12/2018
Il n’est pas admissible qu’un(e) adolescent(e) se suicide après avoir été victime de harcèlement de la part d’un groupe d’élèves ou d’une seule personne ! Le harcèlement débute à l’école, pourchasse jusque dans la sphère publique pour acculer et triompher dans la sphère privée.
Les harceleurs utilisent aussi bien les réseaux sociaux que l’intimidation physique et verbale.
S’il est important de comprendre le cheminement psychologique de la victime, il est aussi vraiment nécessaire que les parents en général, ceux des harceleurs en particulier, se posent les bonnes questions. Mais comment savoir si mon enfant est victime ou bourreau ? Clairement, tout parent est à même de distinguer le caractère de son enfant, intro/extraverti, aime montrer qu’il domine, réservé… Il est impératif de se poser quelques questions factuelles : comment mon enfant utilise son portable ? Quelle est la qualité de ses relations sociales ? Quelle est son attitude, son comportement en groupe ? Ce n’est pas l’affaire de l’école, c’est bien au sein de la famille que tout commence, qu’elle soit reconstituée, monoparentale ou avec les parents d’origine. Ce qui est sûr, c’est qu’aussi bien du côté du harceleur que du côté du harcelé, les parents doivent s’interroger.
Les statistiques sont certes en baisse depuis 2003 mais en 2014, ce sont 8 885 suicides en France alors que les décès liés aux accidents de la route sont de 3 384… c’est la 2ème cause de mortalité chez les 15-24 ans. La pendaison est la méthode la plus utilisée, 6 cas sur 10 ! Lorsqu’on y réfléchit un instant, le harcèlement confine, étouffe de la même manière qu’un nœud coulant vient comprimer la trachée et provoque la suffocation, la mort. Les tentatives de suicide sont 20 fois plus nombreuses que le nombre de suicides. Les causes évoquées ? La solitude, la dépression, la maladie physique, les problèmes de couple ou de famille.
Le suicide est un fait social déterminé par ce qui relève de l’intime et du relationnel, la religion et la famille protègent du suicide parce qu’elles l’interdisent et fédèrent les personnes autour d’un enjeu collectif qui suscite un profond sentiment d’appartenance. Le sentiment d’appartenance/d’inclusion est ainsi un élément déterminant dans le passage à l’acte.
Selon Durkheim, et même si cela a été sujet à controverse, il existe 4 catégories de suicides :
- le suicide égoïste qui fait suite à un défaut d’intégration, comme une personne célibataire qui s’est complètement isolée et se sent exclue de la société,
- le suicide altruiste qui fait suite à un excès d’intégration, comme les fanatiques,
- le suicide anomique qui fait suite à un défaut de régulation, de normes, de règles,
- le suicide fataliste qui fait suite à un excès de règles qui viennent empêcher toute expression individuelle.
Pragmatiquement, si on garde à l’esprit la relation étroite entretenue par l’individu et son environnement, cette catégorisation fait sens.
La personne qui se suicide est guidée par des raisons, des causes qui ne sont pas les bonnes d’un point de vue extérieur. Elle est donc dans un état psychologique confus, poussée par des justifications collectives qu’elle a intériorisé dans un désir de reconnaissance absolu, « à tout prix ».
Que l’on retienne cette classification ou non, on peut faire une seule distinction, le suicide impulsif et le réfléchi. Ce qui pousse au suicide ce sont des faits, des circonstances, des sentiments ou des pensées qui isolent la personne des autres.
La mélancolie ! Selon Freud, le suicide est une dépression profonde et douloureuse, une suspension de l’intérêt pour le monde extérieur, la perte de la capacité d’aimer, l’inhibition de toute activité et la diminution du sentiment d’estime de soi (1958).
La mélancolie est l’acmé de l’état dépressif, la situation sociale est déterminante pour le passage à l’acte. C’est le cas lors d’un deuil ou d’un évènement traumatique où la personne va ressentir un profond désespoir et ne va pas en parler à son entourage.
Le suicide résulte d’un deuil inabouti. Deuil de la reconnaissance dont le point de départ est le groupe auquel la victime s’était identifiée. Il servait à étayer son Moi et son narcissisme. La perte c’est l’exclusion, le rejet ou encore l’humiliation. Elle est vécue comme un effondrement psychologique.
Bien entendu, toute mélancolie ne mène pas au suicide ni à une tentative de suicide, cependant la personne connait des phases où l’idée suicidaire est prégnante. L’idée est là !
La mélancolie, ce profond sentiment de solitude, de ne pas être écouté, ni entendu. On observe que nos proches ne sont pas attentifs à notre comportement alors que nous sommes intimement/viscéralement convaincus qu’ils devraient l’être. C’est ça qui plonge la personne dans un gouffre de désespoir sans fond. Et si elle en parle, le risque est que le proche minimise le fait, « c’est pas si grave »… « tu te fais des idées »… « sois moins nombriliste »… alors le gamin se replie sur lui-même, se renferme. Il a la boule au ventre le matin en partant à l’école avec la peur qui devient son fidèle ami. Le gamin anticipe les conséquences sur ses parents, sur sa famille… alors il fait mine le soir que tout va bien.
Alors comment identifier cette tristesse, cet abattement, ce comportement à la limite du passage à l’acte ? En observant les réactions de l’enfant lorsqu’on discute avec lui. Il est important de garder à l’esprit que 2 comportements sont possibles : un repli sur soi avec une attitude hypotonique (c’est-à-dire sans tension musculaire), le menton relevé ou baissé ; ou un comportement faussement extraverti avec une attitude tonique et un regard qui soutient le vôtre. Il est également important d’observer si la personne cligne des paupières ou très peu. Si ce n’est pas le cas, cela traduit une « absence », la personne semble être présente alors que seul son corps est là, son esprit est perdu ailleurs et elle n’intègre pas les informations qui lui parviennent de l’extérieur.
Dans le cas où le parent a pu observer ces signes précurseurs mais qu’il les a niés, c’est qu’il a subi l’influence sociale pour vérifier et valider son ressenti. Si les autres personnes de la fratrie, de la famille ou même du cercle social proche, n’ont eux-mêmes pas observé ces signes, alors le parent se range de leur côté et infirme ses observations. « S’agissant d’une réalité sociale aussi bien que physique (Festinger, 1950), le principe fondamental guidant cette épistémologie de sens commun (…) serait donc celui du consensus. Si l’heuristique du grand nombre (Chaiken, 1987) semble dominer le processus de validation subjective, il faut cependant envisager que celle-ci puisse aussi reposer sur un autre principe épistémologique, celui de la coordination des points de vue (Mugny, Huguet, Perez – Influence sociale et processus de décentration – bulletin de psychologie, 1992, vol. 45, n°405, p. 155 à 163). »
Mais le parent a aussi pu passer à côté de ces signes précurseurs en préférant, inconsciemment, les éluder, les éviter. L’évitement et le déni sont une fuite émotionnelle. C’est comme vouloir revenir au moment précédent les évènements pour ne pas s’y confronter, c’est nier la réalité qui ne manquerait pas de nous placer en déséquilibre psychique. Se confronter à la réalité provoquerait un nécessaire changement si couteux émotionnellement. Il s’agit là d’un renforcement négatif, en termes comportementaliste : « j’ai peur, j’évite/je fuis, je n’ai plus peur… » pour autant, le problème reste entier. Se confronter à la réalité, c’est devoir faire un choix qui entrainera inévitablement un renoncement et renoncer, c’est perdre quelque chose et en faire le deuil.
Il n’est pas admissible de laisser la violence physique et morale s’étendre, se développer au sein des écoles et des familles. Il n’est pas admissible de laisser les enfants se débrouiller seuls trop tôt dans une société où l’avoir prime sur l’être. Il appartient à chacun de se questionner, de se positionner en tant que parent responsable, garant des limites qui sont là pour la cohésion sociale autant que pour rassurer. Comprendre le processus suicidaire permet d’en appréhender sa complexité. C’est aussi se donner la possibilité d’agir et de lutter contre ce sentiment d’impuissance qui transpire de cet acte.
« Je qualifie la violence dont je parle de fondamentale car je pense qu’elle touche aux fondations de toute structure de la personnalité, quelle que puisse être cette structure. La violence dont il est question ici correspond étymologiquement à une force vitale présente dès l’origine de la vie (Bergeret). »
Sources :
Cairn.info / logique des homicides dits altruistes
DE LARA – Le mélancolique et le risque suicidaire
Georges GENIL-PERRIN
Charles VALLON
Le Monde.fr – Alexandre POUCHARD – 09/02/2016
Le Monde.fr – François BEGUIN – 05/05/2018
Mucchielli, Renneville – Les causes du suicide : pathologie individuelle ou sociale ? Durkheim, Halbwachs et les psychiatres de leur temps (1830-1930).
cps-le-faubourg.org/wp-content/uploads/Les-phases-du-processus-suicidaire.pdf
Le Comportementalisme pour les Nuls !
Le 29/10/2018
Le comportementalisme (ou encore le behaviorisme) est né à la fin du 19ème siècle, début du 20ème.
Son paradigme originel est que le comportement d’un individu est conditionné par une réponse réflexe à un stimulus, puis il a évolué avec l’introduction de l’interaction avec l’environnement.
L’objectif du comportementalisme est la prédiction et le contrôle du comportement, en faisant abstraction de l’économie psychique de l’individu. C’est donc se doter d’un pouvoir prédictif et d’une possibilité de modifier le comportement, de l’induire.
Aujourd’hui, dans sa forme évoluée, ce sont les Thérapies Comportementales et Cognitives. A titre personnel, j’ajouterais que l’apport de l’outil de la Synergologie est une option forte pour affiner l’analyse du comportement.
Pour ma part, je situe les débuts du comportementalisme dans l’établissement de Jacques Belhomme, fin 18ème. Un lieu où sont regroupés les aliénés et les criminels, sans distinction et sans objectif thérapeutique. Ils vivent dans des conditions insalubres, ils sont maltraités et enchaînés et surtout, il faut qu’ils restent à la marge de la société. Ce type d’établissements se posait comme régulateurs sociaux.
C’est dans ces lieux que Philippe PINEL, s’appuyant sur l’expérience d’un surveillant – Jean-Baptiste PUSSIN, va intervenir pour développer ce qui sera le précurseur de la psychothérapie. PINEL considère que les aliénés peuvent être compris et soignés, et ça doit commencer par leur ôter leurs chaînes.
Le comportementalisme passe par les travaux d’Edward THORNDIKE (théorie connexionniste), d’Ivan PAVLOV (conditionnement répondant), de John Broadus WATSON (behaviorisme radical) et de Burrhus Frédéric SKINNER (conditionnement opérant).
SKINNER apporte les bases d’un conditionnement opérant, plus complexe que le conditionnement répondant Pavlovien. Il montre que les conditions qui entourent une action ont des conséquences sur celle-ci, et inversement. Les actions du conditionnement répondant sont en fait des réflexes, alors que celles du conditionnement opérant sont des conduites complexes qui interagissent avec leur milieu.
L’occurrence d’une réponse à un stimulus et à ses effets sur l’environnement accroît la probabilité qu’elle se renouvelle. C’est donc un ensemble de conditions et de conséquences qui déterminent le renouvellement du comportement et le renforce en tant que réponse adaptative.
Par exemple, l’agressivité, l’angoisse, la peur, le besoin compulsif d’ «avoir» se développent parce que l’environnement direct les a renforcés en y répondant favorablement. Il les a donc encouragés à se reproduire.
Ce qui est intéressant lorsqu’on ajoute à l’analyse comportementale le facteur « économie psychique », c’est que les mécanismes de défense que sont le refoulement et la sublimation revêtent la fonction de régulation et de transformation des pulsions en des voies plus acceptables socialement.
Ainsi, en agissant sur le comportement d’un individu, son système (en tant qu’environnement direct) et ses mécanismes de défense, le comportementaliste a la possibilité de ramener une personne dans un équilibre psychologique plus efficient.
J’observe aujourd’hui que les neurosciences travaillent à vouloir localiser dans le cerveau sa partie incriminée dans un comportement adapté et inadapté. Les applications sont nombreuses, comme dans le domaine de la psychiatrie, de l’éducation… Cependant, le public profane pourrait croire que les neurosciences font l’impasse sur tout ce que nous avons vu plus haut et de surcroît, à cause d’une surmédiatisation des travaux réalisés et de leur vulgarisation, cela peut contribuer à diffuser des informations qui peuvent être mal interprétées par le public profane. Les projets développés sont passionnants, néanmoins je pense que l’individu peut en profiter pour se dédouaner de toute responsabilité quant à ses actes… mais ça, c’est un autre débat !
Liens :
http://cogimage.dsi.cnrs.fr/projets/dyco/index.htm
http://cogimage.dsi.cnrs.fr/projets/nemesis/index.htm
https://www.youtube.com/watch?v=QMJzZB2oQSA
https://www.youtube.com/watch?v=sFiPTGQnE08
https://www.revmed.ch/RMS/2006/RMS-82/31342
https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/autisme
http://www.blog-lecerveau.org/blog/2014/05/19/deux-perles-de-vulgarisation-scientifique/
http://www.slate.fr/story/108511/mefiez-vous-neurosciences-education
http://www.psychologies.com/Dico-Psycho/Comportementalisme
http://psy-enfant.fr/comportementalisme-behaviorisme-tcc/
Portes Ouvertes des Artistes de Ménilmontant
Le 08/09/2018
Du 27 au 30 septembre, de 14h à 20h (nocturne jusqu'à 22h le 28), les Artistes de Ménilmontant organisent des Portes Ouvertes !
Je vous invite à venir découvrir les différentes activités qui y sont pratiquées, notamment le CERCE.
Le CERCE est un collectif regroupant 3 artistes art-thérapeutes, Véronique TAT (violoncelliste concertiste, enseignante et musicothérapeute) - Alessandra LANEVE (peintre, art-plastique, calligraphe japonaise, graphiste et art-thérapeute) - Patrick LAURIN (peintre, art-thérapeute, formateur et superviseur en art-thérapie) qui ont la gentillesse de m'accueillir pour débuter mon activité de psy en libéral dès le mois d'octobre.
La complémentarité entre la psychothérapie et l'art-thérapie n'est plus à démontrer... lorsqu'en plus cela se pratique dans un cadre doté d'une âme bienveillante !
Venez donc nombreux nous rencontrer et nous nous ferons un plaisir de vous présenter nos activités.
https://ateliersdemenilmontant.org/adm/portes_ouvertes/portes_ouvertes.htm
La force d’un témoignage investi et authentique !
Le 05/08/2018
Article qui aurait également pu s’intituler : « Reconnaître le dysfonctionnement du lien mère-fille au travers d’un témoignage relatif à un TCA », dans la mesure où ce dysfonctionnement est clairement désigné au travers d’un geste spécifique, à 2 moments uniques de cette interview. Nous verrons quel est ce geste un peu plus loin.
Double objectif aussi pour cette analyse qui pointera les marqueurs gestuels témoins de la véracité d’un témoignage, ici un trouble du comportement alimentaire, et l’évocation inconsciente d’une information connexe non prévue, ici le lien mère-fille dans l’enfance.
Rappelons que dans le mensonge, il est fréquent que l’individu regarde significativement son interlocuteur pour constater si son histoire est crue par l’autre. Il emploie plus volontiers des pronoms impersonnels et se dissocie de l’évènement qui est généralement une histoire peu complexe illustrée par des mots à teinte négative.
En revanche, dans la vérité l’emploi du « je » est fréquent, la personne assume sa responsabilité dans l’événement et le regard se défocalise involontairement (défocalisation passive) et fréquemment.
Ely Killeuse est bloggeuse et témoigne, pour le Huffington Post, de sa relation avec ses parents lorsqu’elle était en proie à un trouble du comportement alimentaire.
A noter qu’il n’y a pas d’image inversée si je me réfère au t-shirt en début de séquence et à son livre qu’elle tient devant elle.
« Quand ma mère s’est aperçue que je me faisais vomir… »
Nous constatons immédiatement cette défocalisation passive du regard, véritable témoin de la véracité du discours. A l’évocation de sa mère, la bloggeuse se démange nettement la base du nez (N20 à 36 sec.), marqueur gestuel spécifique qui signifie que tout n’est pas dit.
L’évènement est décrit tout d’abord avec la main gauche (40 sec.) puis ce sont les deux mains qui sont employées (cognition incarnée) ; main gauche qui nous indique que le sujet la touche particulièrement.
Ely Killeuse montre une certaine rigidité (liée à elle, à son histoire) par le côté extérieur gauche de sa bouche qui s’étire (40 sec.). Cette gêne liée à l’image renvoyée aux autres et à soi est aussi visible par la lèvre inférieure qui s’étire vers le bas, laissant apparaître les dents (45 sec. avec la vitesse réduite à 25%). Cette gêne ressentie est un mélange de peur et de dégoût que nous pourrions réinterpréter comme une révulsion ressentie face à sa maladie.
« Ensuite, j’allais me faire vomir et vu que mes parents travaillaient tard, ils ne s’en rendaient pas compte. »
A nouveau, Ely Killeuse défocalise son regard, témoin de son sentiment de culpabilité. Les sourcils se lèvent pour souligner les propos (53 sec.). A la fin de l’évocation de son souvenir, sa bouche se ferme avec une tension visible dans la mâchoire, ce qui indique qu’elle ne souhaite pas en dire davantage.
Lorsqu’elle parle des vomissements répétitifs et des conséquences sur la santé, sa bouche se ferme pour en dévoiler peu sur ce sujet et sa langue sort très rapidement en son centre (1 min. 14 sec.). Est-ce une langue de vipère ou une langue de délectation ? J’opte pour le fait qu’elle savait ce qu’elle encourait mais qu’elle n’en avait pas pris conscience. Sa langue sortie vient donc nous dire « oui je le savais mais je l’ai fait quand même, parce qu’à ce moment-là, j’en avais besoin pour mon équilibre psychologique.» Et c’est ce qu’elle nous confirme juste après lorsqu’elle dit que « l’envie d’être mince était plus intéressante que de prendre soin de ma santé. »
« Ce qui m’a vraiment aidée, c’est quand ma mère m’a emmenée faire du shopping… »
Voici le second moment important de l’interview, lorsqu’elle évoque sans en avoir conscience sa relation dyadique mère-fille. Ce qui est intéressant, c’est à nouveau cette micro démangeaison faite avec son index gauche (l’index est le « je » personnel, celui qu’on tend lorsqu’on veut prendre la parole) à la base du nez (N20) et qui nous indique des propose cachés, des non-dits. Elle déglutit, sa mâchoire se crispe quand elle avoue qu’elle se faisait mal autant qu’aux autres, ses yeux sont humides et sa bouche se ferme pour ne plus trop en dire (1 min. 34 sec.).
« Mon père rentre tard, ma mère, elle, elle a l’avantage de travailler en poste… »
Ce coup-ci, c’est son majeur droit qui vient gratter la base de son nez alors que ses propos font référence à son père ET à sa mère. Ce geste m’interroge, effectué de la main droite il induit l’environnement, le monde extérieur tandis que le majeur fait référence à la libido, au couple…
Pour ma part, je comprends qu’il y a une tension à la base dans la relation dyadique mère-fille, comme je l’ai précédemment dit, et que cette tension a grandi du fait du TCA de Ely. Ce geste traduit inconsciemment un reproche adressé à sa mère, un manque qui a été ressenti avec force et qui a été à l’origine du TCA. Le manque, qui fut source d’une grande angoisse pour la bloggeuse, a été redirigé vers le corps, vers une action (décharge pulsionnelle de l’agir) pour satisfaire son homéostasie.
Quelques dizaines de secondes après (2 min. 24 sec.), Ely se démange une partie du corps qu’on ne voit pas du fait du cadrage de la caméra, lorsqu’elle dit qu’il est nécessaire d’aller consulter un médecin bienveillant. Elle marque ainsi son regret de ne pas en avoir trouvé un, ou de ne pas l’avoir fait.
« Malheureusement, dès l’enfance on instruit un rapport compliqué à l’alimentation… »
C’est par ailleurs un autre moment important de cet entretien parce qu’il témoigne d’un vrai rejet. Le regard se détourne franchement à sa droite, semblant vouloir éviter son propos. Elle place ainsi de facto l’alimentation, qu’elle aime et qu’elle vante, sur sa gauche (côté cœur bien sûr).
Les mains s’activent à nouveau, paumes dirigées vers elle et formant ainsi une bulle imaginaire protectrice. Ainsi, elle s’associe à son discours.
Dans cette analyse, nous avons vu que les marqueurs gestuels mis en avant, de façon inconsciente, par la bloggeuse traduisent un discours vrai, un témoignage de son expérience personnelle mais dévoilent également de façon insidieuse l’origine de son TCA.
Ces marqueurs sont perceptibles à l’œil nu pour autant que nous soyons entraînés à y faire attention. Ils sont importants parce que leur appréciation permettra un meilleur questionnement du thérapeute, notamment sur les non-dits du patient, mais également dans un cadre judiciaire.
Pour information à propos des TCA, Irène Chatoor et l’école de Washington ont établi la classification nosographique la plus reconnue en France et à l’étranger des TCA, qui permet un meilleur diagnostic :
- Le trouble alimentaire de la régulation des états,
- Le trouble alimentaire associé à un manque de réciprocité mère-nourrisson,
- Les aversions sensorielles alimentaires,
- Le trouble alimentaire associé à des conditions médicales concurrentes,
- Le trouble alimentaire post-traumatique.
Pour une bonne prise en charge, le thérapeute se doit de :
- Ne pas exclure la possibilité d’une cause organique,
- Evaluer l’intensité du trouble relationnel et les répercussions sur l’enfant de la personnalité des parents,
- Proposer une guidance maternelle et la requalification des compétences paternelles.
Pour la suite me concernant, je serai en formation sur la prise en charge du trauma psy en septembre et dès novembre j’aurais l’honneur de participer à une certification à l’entretien cognitif (une première en France), dispensée par le Pr. Jacques Py. L’entretien cognitif a été récemment utilisé en France pour une affaire pédo criminelle et a déjà démontré sa très grande utilité outre atlantique.
Lien vers la vidéo :
https://www.youtube.com/watch?v=AjqKlyPHfow
Liens vers les articles connexes :
https://projet.chu-besancon.fr/pmb/PMB_Ecoles/opac_css/doc_num.php?explnum_id=171
https://www.cairn.info/revue-perspectives-psy-2007-4-p-354.htm
http://www.lemangeur-ocha.com/wp-content/uploads/2012/04/AlimAdos-Meryem-Sellami3.pdf
newman et al 2003 – Lying words : Predicting deception from linguistic styles
http://psychotemoins.inist.fr/?Ameliorer-la-qualite-des-portraits
Analyse Flash : Redouane Faïd, braqueur un jour, braqueur toujours !
Le 05/07/2018
3 images simples pour illustrer qui est Redouane Faid, l’enfant qu’il a été et le braqueur qu’il sera toujours.
« Je me suis toujours gardé de véhiculer une aura et une légende en disant que c’est bien de faire ça… »
Il le scande comme un mantra mais il énonce simplement le symbole qui le guide lui, et vers ce à quoi il veut tendre : être plus le plus reconnu de tous les braqueurs !
Les propos sont dits posément, sans agressivité qui elle, est lisible sur son corps. Sa langue sort de sa bouche pour y rentrer rapidement, une image presque imperceptible mais dont le sens est : je ravale mes propos.
Axe de tête latéral droit ajouté à un axe de tête rotatif droit, lesquels sont renforcés par un axe sagital supérieur. Il se croit et se place au-dessus des autres, guidé par l’ambition et la quête de reconnaissance : il se voit comme un rebelle et le dit avec le sourire.
La position du buste en arrière et vers sa droite montre qu’il est dans une posture analytique, réfléchie. Son sourcil gauche est relevé par rapport au droit, ce qui le met à distance des autres. Il se veut à part, différent.
« Quand vous grandissez dans une cité, on fait pas attention à vous… »
Le voilà son point de départ d’adaptation sociale, son T0 qui motive son ambition. C’est ce que je tente de clamer, de relayer haut et fort que l’enfant a besoin d’attention, de bienveillance et d’inclusion. Le cas échéant, nul ne peut prédire les voies créatives qu’il peut emprunter pour arriver à exister.
Son menton est froncé en une moue de regret, de dépit qui transmet au fond une tristesse ressentie et contre balancé par un sourire ironique qui revient très souvent tout au long de ses interviews. Il nous rit au nez ! Sa tristesse est domestiquée et surmontée à grand renfort de clivage bien versus mal, vision pour le moins binaire et enfantine du monde vu par un petit gars de la cité (rien de péjoratif dans mes propos, je vous rassure). C’est malheureusement trop souvent la loi de la débrouillardise et du plus fort qui l’emporte dans cet environnement.
« Je me suis fait arrêter et ça m’a servi à stopper tout ça… »
Aller, pour un peu on pourrait y croire… Non ? Non, pas une once de vérité dans tout cela. Comment serait-ce possible lorsque la tête se désaxe tellement pour venir se placer à l’opposé de ce que les yeux regardent ?! Ses paroles vont dans un sens, ce qu’il pense réellement va dans l’autre sens.
Criminel un jour, criminel toujours !
Lien vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=_WJytJmlOqs
Affaire de 8 infanticides : Dominique Cottrez
Le 11/06/2018
Le fait divers criminel est toujours/souvent l’occasion d’un débat/intérêt passionné et fascinant. L’amour peut y côtoyer la mort et certains crimes peuvent rester incompris du grand public, à cause de la nature même du crime, du scénario joué ou encore de l’auteur(e) et des victimes.
C’est le cas de l’infanticide. C’est un crime à traiter à part des autres, qui eux, sont souvent la conséquence de frustration, de jalousie, de haine. Mais qu’en est-il lorsqu’il est la conséquence de l’amour sur fond de crypte ? Comment comprendre cet acte d’une mère à l’encontre de son nouveau-né ? Pour tenter de comprendre ce passage à l’acte, il faut faire preuve d’une profonde et réelle empathie cognitive (et non émotionnelle).
Rappel des faits
Les acquéreurs d’une maison découvrent, en réalisant des travaux dans leur nouveau jardin, deux sacs en plastiques contenants les cadavres de deux bébés. Cette maison appartenait au père de Dominique Cottrez, qui reconnaîtra être la mère des bébés, de même qu’elle reconnaîtra la présence de six autres corps dans son garage et sa chambre à coucher.
Aucun des corps ne porte de trace de violence. Dominique Cottrez (DC – je n’y peux rien…) explique au juge avoir été victime d’inceste pendant très longtemps (propos niés par la suite, cependant il ne faut pas oublier l’état de sidération que peut provoquer un traumatisme psychique, et donc la possibilité d’état de confusion dans lequel se trouve la victime, même des années après les faits) et avoir agi par crainte que les enfants ne soient de son propre père.
Après deux ans de détention provisoire, DC a été remise en liberté et placée sous contrôle judiciaire.
De l’économie psy
Chaque affaire d’infanticide ne doit pas faire appel à des statistiques, parce qu’elle est empreinte d’un contexte familial lourd et propre à chacun.
Ainsi, le profil de la mère infanticide (meurtre d’un bébé de moins de trois jours) concernerait des femmes jeunes, célibataires, sans antécédent psychiatrique et accouchant seules suite à un déni de grossesse. Le profil de la mère liberticide (meurtre d’un enfant âgé de un à onze ans) concernerait des femmes plus âgées, qui passent à l’acte dans un contexte pathologique dépressif sévère (Besnier, 2004).
Ces profils ne s’appliquent pas à DC. En premier lieu parce qu’il ne s’agit pas d’un déni de grossesse mais d’une dissimulation de grossesse. DC reconnaît et a conscience de ses grossesses mais elle est incapable d’en parler à quiconque. Dans le cas de DC, le passage à l’acte est un aveu de ne pas pouvoir établir de lien primaire, propre à la mère et à son nouveau-né. Elle aime trop ses enfants, même si cela semble paradoxal, pour les laisser exister/vivre en tant que conséquences de viols.
Au même titre qu’il existe des suicides altruistes, il existe (et c’est ici le cas) des meurtres altruistes. Ils sont la conséquence de carences affectives importantes et mortifères, d’un sentiment d’abandon profond et vraisemblablement de traumatismes qui datent de l’enfance et non traités. Traités suite à une résilience ou par une intervention extérieure. Il a été impossible à DC d’extérioriser/verbaliser ses épisodes traumatiques. La seule voie d’expression fut la somatisation dans le meurtre, somatisation paroxysmique des traumas subis.
Le refoulement peut avoir des effets délétères si l’évènement n’est pas pris en charge. Pour DC, accoucher et tuer ses enfants seraient comme taire ses mots/maux révélateurs du trauma. Elle est dans l’impossibilité de nommer ses enfants victimes parce qu’ils sont la représentation insupportable de la mauvaise mère, l’incarnation du mauvais sein, d’où une image de soi fortement dégradée, insupportable, confortée par un physique qui n’est plus une représentation féminine.
Le silence tue !
Garder les corps à proximité d’elle était comme se donner la possibilité de hurler ses mots/maux quand nécessaire, en posant simplement un regard sur les cadavres gardés à demeure et à l’insu (déni ?) de sa famille, son mari en particulier.