L’analyse comportementale trouve tout son intérêt opérationnel lors d’enquêtes criminelles. La structure développée par DS2C est adaptable pour profiler les suspects mais également pour la victimologie.
Aux Etats-Unis, pour ce qui concerne le FBI et son unité de Sciences Comportementales, les enquêtes sur les meurtres en série posent de nombreux problèmes. Cela va de la pression extérieure exercée par le public, les médias et la justice à la frustration ressentie par les enquêteurs qui ne parviennent pas à identifier l'auteur de l'infraction.
Dans la majorité des meurtres en série, il n'y a pas de lien entre l'auteur et les victimes. Cela diffère de la plupart des enquêtes sur les crimes violents où il existe un lien familial ou social entre l'auteur et la victime. Cette absence de lien entre l'auteur et la victime empêche les enquêtes de routine, qui commencent par la victime et ses relations connues avec son conjoint, ses amis, ses connaissances.
Evaluation de la scène de crime
L’analyse commence par la scène de crime car l’interaction entre l’auteur de l’infraction et la victime peut mettre en évidence un certain nombre de facteurs :
• L’approche de la victime,
• La nature de l’interaction,
• La nature de l’interaction sexuelle,
• Le choix du ou des arme(s),
• La manière dont la mort est survenue,
• La méthode d’élimination du corps.
Tous ces facteurs contribuent à déterminer l’expérience et les compétences du criminel.
Victimologie
Outre l'interaction entre la victime et l'agresseur, les facteurs de risque des victimes constituent un autre élément clé de l'enquête sur les homicides en série. Les niveaux de risque des victimes peuvent être définis comme la mesure dans laquelle la personnalité, le comportement, le mode de vie, les habitudes, les attributs physiques, le lieu, les circonstances, le jugement, la conscience de la sécurité et/ou d'autres facteurs personnels ont affecté la probabilité d'une victimisation criminelle.
Les niveaux de risque des victimes sont déterminés à l'aide d'informations sur la victimologie, qui comprennent :
• Le genre,
• L’âge,
• Les loisirs,
• Le statut matrimonial,
• Les anciennes relations intimes,
• Les antécédents judiciaires,
• Les antécédents en matière de consommation de drogue, d’alcool,
• Le type de domicile,
• Les relations avec le voisinage,
• Le taux de criminalité dans la communauté.
Les victimes peuvent être classées selon un degré de risque allant de bas à haut.
Une victime à bas risque est une personne qui généralement a une probabilité marginale de victimisation, selon les différents facteurs cités ci-dessus.
Une victime à risque modéré est une personne qui généralement a une probabilité de victimisation due à son comportement atypique selon que le risque situationnel était élevé au moment du crime.
Une victime a risque élevé est une personne qui généralement a une forte probabilité de victimisation. La victimologie peut aider à identifier comment le criminel choisit ses victimes, et son choix se fait selon 3 critères :
• La disponibilité : le lien entre le criminel et sa victime,
• La vulnérabilité : les situations et les circonstances dans la vie de la victime permettent au criminel de la choisir,
• La désirabilité : l’attractivité de la victime potentielle (dans les meurtres sexuels) ou qu’elle réponde aux besoins du criminel.
L'utilisation de l'analyse de la scène de crime et des informations relatives à la victimologie permet de déterminer si le criminel ciblait des victimes particulières ou s'il trouvait des victimes d'opportunité dans une zone de chasse. Les zones de chasse sont décrites comme des zones géographiques que le criminel identifie, qu'il connait et qu'il utilise ensuite pour attaquer les victimes potentielles qui y pénètrent.
Motivation
La motivation est déterminée par l'examen d'une combinaison d'éléments, notamment l'interaction entre la victime et l'agresseur, le choix de la victime et les preuves médico-légales. Bien que les tueurs qui partagent les mêmes motivations puissent présenter un certain nombre de traits similaires, les facteurs spécifiques ou la combinaison de ces facteurs diffèrent d'un tueur à l'autre. La raison de ces différences réside dans le comportement unique du tueur individuel, du choix des victimes, des moyens utilisés pour tuer et des inclinations du tueur.
Pour analyser correctement la motivation, les enquêteurs doivent examiner tous ces facteurs.
Liens entre les meurtres
Le lien entre les différents meurtres est essentiel à l'identification d'un tueur en série. Il est primordial d'identifier le premier meurtre ou la première tentative de meurtre d'une série. Comme pour tout autre comportement humain, la première fois qu'un événement est exécuté, les risques d'erreurs sont plus élevés.
La connexion entre différents meurtres se fait suivant les facteurs suivants :
• Un mode opératoire cohérent,
• Un choix similaire des victimes,
• Une approche commune des victimes,
• Des interactions physiques et/ou sexuelles similaires,
• L’utilisation d’armes similaires,
• Une cause de la mort similaire,
• Des résultats médico-légaux similaires,
• La location géographique des meurtres,
• La temporalité des faits.
Investigations
La recherche d'un tueur en série exige des enquêteurs qu'ils considèrent l'enquête comme un résumé des éléments suivants :
• La zone géographique : la zone où opère le tueur en série est-elle un environnement rural, suburbain ou urbain ? Le choix des victimes par le tueur en série limite-t-il la localisation des victimes potentielles ? En outre, la région est-elle majoritairement habitée par un seul groupe racial ou est-elle racialement mixte ? Cela peut indiquer la race de l'auteur de l'infraction car cela peut montrer la capacité de l'auteur à se déplacer librement dans une communauté sans être remarqué.
• Le type de la victime : le délinquant cible-t-il des victimes spécifiques ou utilise-t-il une "zone de chasse" et cible-t-il toute victime potentielle qui entre dans cette zone ? Y a-t-il d'autres facteurs que l'auteur de l'infraction cible spécifiquement (par exemple les prostituées) ?
• Moyens d'accès aux victimes : comment l'auteur de l'infraction entre-t-il en contact avec les victimes ? Le meurtrier entre-t-il dans une résidence pour attaquer les victimes, ramasse-t-il une prostituée dans la rue, ou utilise-t-il d'autres circonstances ? Chacun de ces scénarios exige des meurtriers qu'ils aient des capacités et des expériences différentes.
• Utilisation d'armes ou manière de mourir : le choix d'une arme par le meurtrier met-il en évidence des expériences antérieures ? Le mode de mort met-il également en évidence des expériences antérieures ? Le meurtrier est-il compétent avec l'arme ou le mode de mise à mort ? Tous ces facteurs peuvent révéler si l'auteur de l'infraction possède certains antécédents.
• Interactions avec la victime : les interactions physiques ou sexuelles avec les victimes révèlent-elles une inclination ou une expérience antérieure ? Certains comportements distincts peuvent indiquer que l'auteur de l'infraction a commis d'autres types de crimes.
• Lieu/manière de procéder à l'élimination du corps : le choix d'un lieu particulier pour l'élimination du corps peut refléter la familiarité de l'auteur de l'infraction avec la région. La manière dont le corps est jeté/positionné peut également refléter la nature de la relation entre l'auteur de l'infraction et la victime.
Comme dans d'autres interactions humaines, il existe des éléments uniques attribuables à chaque individu. Chacun des comportements ultérieurs des délinquants lors d'interactions violentes peut présenter des caractéristiques uniques. Tous ces facteurs doivent être identifiés et pris en compte. L'idée est d'utiliser les éléments identifiés dans un meurtre en série particulier comme source de pools de suspects potentiels. En divisant ces éléments en listes, puis en recoupant les différentes listes, il est possible de mettre en évidence des suspects potentiels.
Les éléments ne constituent pas une liste de contrôle dans laquelle les enquêteurs se contentent d'insérer un ou deux facteurs dans un modèle et ce modèle révèle un seul et unique auteur de crime. Au contraire, ils permettent de mesurer certains comportements des criminels sur la base d'une confluence d'éléments qui aboutissent à un ou plusieurs groupes de suspects potentiels.
Malgré les faiblesses de la classification organisée/désorganisée des tueurs en série, elle est utilisée pour les profils des meurtriers. Cette dichotomie a été testée sur 39 aspects de meurtres en série dérivés de 100 meurtres commis par 100 tueurs en série américains.
Les résultats n'ont pas révélé de sous-ensembles distincts de caractéristiques d'infractions reflétant la dichotomie. Ils ont mis en évidence un sous-ensemble de caractéristiques organisées typiques de la plupart des meurtres en série. Les caractéristiques désorganisées sont beaucoup plus rares et ne forment pas un type distinct.
Références :
Canter, D. V., Alison, L. J., Alison, E., & Wentink, N. (2004). The Organized/Disorganized Typology of Serial Murder: Myth or Model? Psychology, Public Policy, and Law, 10(3), 293–320. https://doi.org/10.1037/1076-8971.10.3.293
SerialMurder-PathwaysForInvestigations.pdf